Je suis Community Manager / Social Media Manager depuis plus de 5 ans maintenant. Un « dino CM » en quelque sorte.
J’ai toujours eu un pied dans la beauté, mais quand j’étais salariée j’ai aussi travaillé dans l’univers food / automobile / high tech …
Depuis 3 ans je suis à 100% dans l’univers beauté – santé et la 3ème bougie de Kalioshka est l’occasion de faire un petit bilan de l’évolution des blogs beauté.
Je suis partie d'un document redigé pour des clients sur une formation que je donnais, et j'ai un peu retravaillé le tout, sauce blog.
Cela va être un peu long, mais que voulez-vous, 2 ans sans écrire, j'ai plein de choses à dire !
Des blogueuses en ligne de mire
Les blogueuses sont contactées quotidiennement par les marques et agences: soirées, envois de produits, voyages organisés (plusieurs blogueurs partent ensemble, accompagnés par les équipes – marque, agences) ou offerts individuellement (séjour tous frais payés offert).
Là, il s’agit généralement de contacts personnalisés mais on ne peut pas échapper aux agences de Relations Presses qui intègrent les blogs dans leurs listings journalistes,bien souvent en offrant cette presta à leurs clients (j'ai travaillé en agence de relations presse, les AP offrait cette presta aux clients '"pour leur montrer", comment le faire payer après et comment valoriser ce travail ?!
On peut donc retrouver des attachées de presse aux commandes alors que ce sont 2 métiers différents. Je ne parle pas d'approches personnalisées mais d'ajout des mails blogueurs aux listings de diffusion des CP (restez 1h sur Twitter et vous verrez, les blogueuses beauté peuvent recevoir des CP très loufoques ...)
Evidemment, certaines AP gérent très bien l'approche des blogueurs et d'autres CM sont nuls, pas de généralités, mais rares sont les CM à dire être "capable" de faire des RP alors que les AP sont beaucoup plus nombreuses à dire pouvoir faire les 2 ...
Cette surenchère se traduit également dans les relations quotidiennes des marques / agences avec les blogueuses : de plus en plus de portages « évènementiels », (quand des envois simples suffisaient à générer des retombées il y a quelques années), de plus en plus d’exclusivités, d’avant-premières, des lancements auprès des blogueuses avant les journalistes … Ce qui entretient la petite discorde blogueurs-journalistes, évidemment.
Pourtant, peu de blogueuses sont professionnelles, dans le sens ou elles n’ont pas toutes de connaissances pointues en formulation par exemple. Certaines travaillent dans des secteurs très éloignés de la communication et du marketing, il faut donc veiller au respect des embargo, à la rédaction des articles, à la connaissance globale des produits/ formules/ marques et évidemment, il faut s’adresser à elles en tant que passionnées de beauté et pas en professionnelles de la cosmétiques. Une innovation, même si elle a demandé 10 ans de recherche et le dépôt de 20 brevets ne parlera pas à une blogueuse si en quelques jours d’utilisation elle ne voit pas l’efficacité du produit. Et c’est légitime, elles ne sont pas là pour parler d’actifs, d’ingrédients, elles bloguent avant tout pour partager des découvertes, donner un avis. Leurs lectrices peuvent s’identifier à elle, bien plus qu’à une journaliste beauté qu’elles ne verront jamais « en vrai » et dont elles ne savent rien : âge ? type de peau ? couleur de peau ?
Un tri nécessaire
Dans l’univers de la beauté, j’ai noté un désintérêt pour les soins depuis un an, un an ½. Il est de plus en plus difficile d’avoir des retombées dédiées à des soins, ce qui s’explique très simplement :
- Sur-sollicitées les blogueuses privilégient les mises en avant de produits à l’effet / au rendu immédiat (maquillage, vernis ont fait une large progression).
- Les blogs sont de plus en plus graphiques, un rouge à lèvre ou un vernis est beaucoup plus « photogénique » qu’une crème pour le corps par exemple. Les articles liés au maquillage sont plus illustrés : photo des produits, du rendu sur peau (et idéalement pas juste un « swatch » sur l’avant bras !)
Cependant, les articles –vraiment– dédiés aux soins sont moins nombreux, mais plus qualitatifs car rédigés par des blogueuses qui ont vraiment testé les produits sur une période adéquate, idéalement avec des produits adaptés à leur peau.
Un exemple
L’an dernier j’ai organisé une soirée pour une très belle marque de soins pharmaceutiques, qui propose également une gamme maquillage. Résultat : toutes les blogueuses présentes à la soirée ont parlé du maquillage, du vernis, et seules 20% ont parlé des soins. Plus facile, plus rapide, plus visuel.
Les concours, booster pour la rédaction d’articles soins
Pour booster la rédaction d’articles sur les soins, les concours (dotations offertes par les marques) sont le seul moyen – sans rémunérer les blogueuses– d’avoir des retombées assurées. Le risque est par contre d’avoir des retombées « concours » sans présentation des soins. Un coup de pouce, donc, mais pas l’assurance d’avoir du contenu sur les produits. Avant tout, il faut que le soin plaise à la blogueuse, elle n’aura pas envie de faire gagner des produits qu’elle ne recommanderait pas.
Aujourd’hui, il existe un flou juridique sur les concours sur les blogs : en France aucun blogueur n’a été condamné pour non respect des lois sur les concours (rédaction et dépôt du règlement chez un huissier …) A terme, je pense qu’il faut s’attendre à une nouvelle législation …
En chemin vers la professionnalisation des blogs
Les blogs ont évolué et se professionnalisent : si hier les blogueuses bloguaient par passion, aujourd’hui elles sont de plus en plus nombreuses à tirer des revenus de leurs blogs, sous différentes formes :
- Directement via leur blog : publicité, articles sponsorisés, affiliation …
- Via le travail rédactionnel : rédactrices sur des blogs de marque, pigistes web …
Bien évidemment ça n’est pas parce qu’un blog se professionnalise que les blogueuses ne sont plus passionnés, ou qu’elles sont boudées par les lectrices, la présence de MonBlogdeFille ou Babillages depuis 5 ans et plus en témoigne.
Le blog devient une véritable vitrine professionnelle, de moins en moins de blogueuses bloguent anonymement et leur présence sur les réseaux sociaux va dans ce sens : on les « connaît » vraiment et elles sont très souvent exposées à la critique. Les lectrices ou autres blogueuses d’ailleurs peuvent mener de véritables croisades contre certaines blogueuses, n’hésitant pas à les « descendre » auprès des marques et agences, en les harcelant à base de « t’es moche » et autres remarques très évoluées. Les blogueuses s’exposent et malheureusement cela fait partie de leur quotidien.
Hyperconnectées, aujourd'hui quasiment toutes les blogueuses beauté ont un compte Instagram, Pinterest, en plus des pages Facebook et comptes Twitter. Elles adoptent facilement les nouveaux outils. Pas folle, la guêpe ...
Les régies spécialisées
Les blogueuses les plus suivies sont aujourd’hui quasiment toutes en régies et tirent donc des profits de leurs blogs certaines blogueuses (surtout dans la mode) sont même maintenant, pour certaines, en exclusivité avec des agences et ce sont les agents qui traitent avec les marques. Cela ne transforme pas les blogueuses en « tête de gondole », les petites marques ont toujours (ouf) leur place sur les blogs mais je pense que pour une marque « moyenne » c’est plus délicat.
Blogueur pour de mauvaises raisons
Cette professionnalisation et tous les avantages qui y sont liés (produits offerts, rémunération, médiatisation) attire les 20-30 ans à ouvrir des blogs puisqu’elles ne voient pas forcément le travail que cela a demandé aux blogueuses.
Ces blogueuses, qui bloguent dans le but d’en tirer profit (les marques et agences reçoivent chaque jour des dizaines de mail de blogueuses ou même de « futures blogueuses ») sont les plus difficiles à gérer pour les marques et agences et elles donnent bien souvent une mauvaise image des blogueuses aux marques. Recevoir une liste de course, recevoir 3 mails par semaine pour demander le nouveau vernis, menacer la marque de « bad buzz » si elle ose refuser, tout ça n’est pas représentatif des milliers de blogueurs réellement passionnés et, plus spécifiquement, des blogueuses que je suis quotidiennement. Je rappelle que j’ai choisi de créer ma structure, spécialisée dans les relations avec les blogueuses, je ne me suis pas lancée dans cette aventure à contre-coeur !
Estimer le pouvoir de prescription d’un blog
Le nombre de blogs ne cesse de croitre mais bien évidemment tous n’ont pas la même visibilité, certains critères reflètent l’audience potentielle d’un blog :
- Âge du blog (rares sont les blogs de moins d’un an à avoir de la visibilité)
- Fréquence de publication
- Qualité rédactionnelle des articles (arguments, orthographe … une blogueuse qui signale les points faibles d’un produit ne sera jamais blamée par une marque, si elle se contente de dire qu’il est nul, là par contre difficile de leur accorder du crédit …)
- Qualité graphique du blog (et on peut dire que ces 2 dernières années les blogueuses se sont déchainées, aujourd’hui un nouveau blog est lancé avec une charte déjà bien définie, un lancement en simultanée sur Facebook / Twitter / Pinterest. Tout est plus pro.
- Nombre de commentaires (et réponses apportées par le blogueur)
- Présence sur les réseaux sociaux (page Facebook, compte Twitter, Profil Instagram, Pinterest, Google+ …)
- Part des articles dédiés aux articles reçus VS aux articles achetés car même si elles sont très sollicitées la présence d’une blogueuse chez Sephora ou Monoprix peut mener à un véritable carnage !
Evolution des attentes des blogueuses envers les marques / agences
- Si elles sont encore flattées d’être invitées par les marques à des soirées avec 15, 20 autres blogueuses, elles recherchent et attendent encore plus d’implication : travail avec des avant-première, des exclusivités, rencontres en petit comité, présence d’experts des marques (maquilleurs, dermatologues …)
- Généralement, elles ne veulent plus recevoir tous les produits et misent sur des envois ultra ciblés, ultra personnalisés : contrairement aux journalistes elles n’ont pas un « devoir d’informer » et ne parleront que des produits qui les concernent et leur correspondent. Une innovation anti-rides aura beau être révolutionnaire sur le marché, si la blogueuse a 20 ans, elle n’en parlera pas. Et les blogueuses beauté sont majoritairement très jeunes (20-30 ans).
- De même, certains « sujets » sont presque bannis sur les blogs : anti-rides, produits minceur … tout ce qui pourrait porter atteinte à leur image, car l’image d’un blog c’est l’image d’une personne, difficile de séparer les deux. Difficile de faire parler de déodorants, de soins minceur, d’hygiène intime sans passer par des articles sponsorisés.
L’arrivée de nouveaux blogs beauté
- Si le cycle de vie d’un blog est limité et que les blogs « à la mode » ne gardent leur place que 4-6 mois, je constate depuis un an, un an 1/2 l’arrivée de nouveaux blogs très qualitatifs qui connaissent une croissance folle (Simone Blog, Carnet Prune par exemple, 2 blogs qui n’existaient pas il y a un an et qui ont très vite été repérés).
- J’accorde beaucoup d’importance à la découverte de nouveaux blogs, déjà parce que c’est indispensable mais aussi parce que je trouve ça très intéressant de découvrir des jeunes blogueuses et de les suivre. Evidemment, je pense qu’en suivant des jeune blogueuses, en leur proposant des opérations rapidement elles garderont une petite place privilégiée pour mes clients dans le futur … Et puis je l’avoue, j’adore voir leurs yeux de petites filles pendant une soirée, à la réception de produits, un enthousiasme qui me permet de ne pas me lasser de mon travail !
Les blogueuses beauté ont souvent mauvaise réputation, trop superficielles, trop capricieuses, mais là encore je suis sure qu’une petite dizaine de blogs vient ternir l’image des blogs beauté. Une blogueuse beauté ça peut être une avocate, une DRH, une chef de groupe, une journaliste et elles savent jouer de leur image de « fille », ne montrent qu’une facette de leur personnalité : la professionnalisation de leurs blogs est la meilleure preuve de leur perspicacité !